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Le bigaradier est un oranger, citrus-aurantius à oranges amères.
Il donne des fleurs au printemps et le moment de la récolte, toujours faite à la main, est choisi avec soin entre mars et avril.
Si les fleurs sont trop fermées, le parfum sera vert, et si elles sont trop avancées, les principes aromatiques seront affadis.
La fleur d'oranger (ou d'oranger amer) pousse sur le bigaradier (Citrus aurantium L.) un arbuste aux feuilles ovales et luisantes. Le bigaradier, épineux, à fleurs blanches, à l’odeur agréable, plus grandes que celle de l’oranger doux (Citrus sinensis).
Dans l'Antiquité, la fleur d'oranger, très parfumée, symbolisait la pureté et servait à la fabrication des couronnes pour les jeunes mariées.
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La fleur d'oranger qui embaume le printemps tunisien alimente dans ce pays un artisanat domestique très actif. Elle est également à l'origine d'une huile essentielle industrielle vendue
13 000 F/kg aux parfumeurs du nord.
"A quoi ça sert l'amour ?" chantait Edith Piaf. "
A quoi bon planter des bigaradiers ?" se demandent, de la même façon, ceux qui ne connaissent de cet arbre que ses fruits amers.
Le bigaradier, sosie de l'oranger, doit sa présence sur les trottoirs des villes tunisiennes à son parfum délicat. C'est en effet grâce à cet arbre, qui est à l'origine de l'ensemble de la famille des citrus, que l'on produit l'eau de fleur d'oranger. Il a l'avantage, en effet, de consommer moins d'eau que l'oranger et de réclamer très peu de soins.
Son introduction en Tunisie remonte à la fin du 19è siècle. "Quand la récolte est bonne, le "zhar" frappe à notre porte comme un miracle..." explique Borhane Khiari, président de l'union locale des agriculteurs de Nabeul (Nord-Est tunisien).
Le mot zhar, qui désigne l'eau obtenue avec les fleurs de bigaradiers signifie également pour les Tunisiens chance, aubaine. Pour Borhane Khiari, l'aubaine, ce n'est nullement les bigarades, fruits amers et immangeables, mais seulement ces fleurs oblongues qui en mars et avril emplissent le pays de leur senteur
exquise.
Distillées, ces fleurs donnent l'eau de fleur d'oranger, parfum indispensable à toute bonne pâtissière ou cuisinière. Outre qu'il calme les nerfs, soulage les maux de tête, donne une sensation de bien être et éveille l'esprit, le zhar est utilisé pour asperger le corps des défunts, ce qui est censé leur donner plus de "zhar", c'est-à-dire de chance, devant l'éternel.La fabrication du zhar est une activité très populaire en Tunisie.
Un tiers de la récolte annuelle, en effet, est distillé par les ménagères, ce qui représente 300 t/an. Pour beaucoup de femmes, cette activité donne lieu à un petit commerce saisonnier. Elles vendent l'eau de fleur d'oranger de porte en porte, dans les lycées et même dans les administrations.
Le néroli, spécialité tunisienne
Des fleurs de bigaradiers, on extrait également le neroli, une huile essentielle utilisée en pharmacie et en parfumerie. Première exportatrice de néroli, la Tunisie en vend actuellement 600 kg/an au marché de Grasse, dans le sud de la France, en Suisse et aux Etats-Unis.
Un kilogramme de néroli est vendu 13 000 F car il faut une tonne de fleurs pour l'obtenir.La culture du bigaradier elle-même fait vivre environ 2000 familles paysannes qui assurent la moitié de la récolte globale.
Celle-ci s'élève à 1000 t/an.
La récolte moyenne par personne étant de 5 kg/jour, cette activité procure 50 000 journées de travail par an.Par ailleurs, la distillation industrielle introduite au temps de la colonisation par les Français dans la ville des potiers (Nabeul), concerne environ les deux tiers de la récolte, soit 600 t/an.
Pendant la saison, l'usine travaille 24 h sur 24, avec trois équipes d'une dizaine de personnes qui se relaient, ceci en plus des six ouvriers permanents.A l'approche de la saison du Zhar, un air de fête règne dans tout le pays.
Les ménagères munies de leur éternel couffin parcourent les vergers à la recherche des fleurs de la baraka.
Les distilleries font leur toilette printanière : badigeonnage, entretien des chaudières et des canalisations.Mais tout climat de fête cache nécessairement des mécontentements. Sadok Slema, président du syndicat des travailleurs de la terre de Nabeul rouspète : "Les industriels sont de fins manipulateurs...
Pour maîtriser le marché, ils ouvrent tardivement les centres de collecte pour que les agriculteurs soient à leur merci et consentent à vendre leur récolte à bas prix." Pourtant, décideurs, agriculteurs et industriels se sont mis d'accord pour fixer un prix minimum : 1,1 dinar, soit 7 FF, le kilo de fleurs.
Mais peut-on vraiment s'y fier ?
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